Etienne Daho - Le Quartz - 27.10.2018
Date et lieu :
Le Quartz, Brest – 27 octobre 2018
Live report :
Un album, Blitz (très) réussi, une critique unanimement positive, un beau succès commercial, des Unes de magazines, un feuilleton/biographie radio remarquable (en podcast sur France Inter) une tournée triomphale...et si l'Artiste de l'Année 2018, était finalement Etienne Daho !?
Etienne Daho, que d'aucun tend encore à caser dans la catégorie « Chanteur à midinettes », est évidemment, bien autre chose, tout à fait autre chose, totalement autre chose... Bien sûr, il reste les succès des années 80, mais si le bonhomme n'avait ne serait-ce qu'une seule qualité, ce serait de ne jamais céder à la facilité, de ne pas suivre sans cesse la même recette.
Il fait même exactement l'inverse, se remettant en cause d'album en album, s'exilant, de longs mois durant, à Rome, à Lisbonne, à New York (Café Reggio où on suppose...) et bien sûr à Londres pour chercher l'inspiration ou provoquer des rencontres engendrant ses très nombreuses collaborations. Figure tutélaire, à l'instar de ce qu'ont pu être à l'époque Serge Gainsbourg ou Alain Bashung, Etienne Daho est devenu pour beaucoup, aujourd'hui, une icône.
Ce n'est d'ailleurs pas un hasard, si ED et sa troupe ont fait un triomphe au dernier festival La Route du Rock à Saint-Malo. Mais, revenons, donc sur cette mémorable soirée à Brest.
En première partie, le Dale Cooper Quartet & The Dictaphones, groupe local de black jazz qui a déjà collaboré, par le passé, avec ED sur quelques titres. Un set très sombre mais extrêmement séduisant, totalement hypnotique : on navigue ici, dans les eaux tourmentées d'Angelo Badalamenti (évidemment, Dale Cooper étant, rappelez-vous, le nom de l'agent spécial dans Twin Peaks de David Lynch) et celles, non moins obscures, des atmosphères trippantes des superbes Portishead. Une vraie découverte et une très bonne surprise.
Mais place au Maître ; on garde l'atmosphère sombre et les sirènes annoncent le bombardement imminent, les guitares entrent en scène pour l'intro de « Les Filles du Canyon ». Et d'entrée, le ton est donné, ce concert sera Rock ou ne sera pas, guitares omniprésentes (3 guitaristes sur scène sur plusieurs morceaux), batterie qui claque fort, ça envoie et ça fait du bien. Et toujours bien sûr, la voix si chaude d'Etienne Daho. Tiens, parlons-en, de cette voix ; beaucoup l'ont raillée, à l'époque, mais, il faut reconnaître qu'il maîtrise totalement son chant, sans jamais avoir l'impression de forcer, son timbre n'a pas bougé et sa technique est irréprochable.
Question écrin, ED avait donc choisi, en cette bonne ville de Brest, la salle du Quartz, Théâtre de 1500 places assises. J'avoue que j'étais un peu inquiet de cette configuration assise, qui bride bien souvent les ambiances ; que nenni, dès le 3ème morceaux (« Sortir ce soir »), tout le monde est debout, et le restera jusqu'à la fin !
Le concert sera à la fois, pour moi, un formidable et émouvant saut dans le passé de la Pop (« Sortir Ce Soir », « Tombé Pour La France », « Le Grand Sommeil »...etc) mais aussi, l'occasion de confirmer que les morceaux du dernier opus (« Blitz », « Le Jardin », « L'Etincelle », quelle classe pour ce dernier !) tiennent sacrément la route sur scène. De plus, ED et sa troupe, ensemble depuis maintenant plusieurs tournées, ont l'habileté de revisiter les standards, leurs donnant une couleur plus rock, comme par exemple, ce « Week-End à Rome » au ralenti, avec pour seul accompagnement la guitare pleine de reverb’ de Jean-Louis Piérot. On aura aussi le droit à un hommage à Syd Barett « Arnold Layne », au « En Surface » de Dominique A et bien sûr aux tubesques « Bleu Comme Toi », « Epaule Tatoo » et autres « Des Attractions Désastre » avant un final sur le superbe « Ouverture ». Un concert incroyablement maîtrisé, une setlist impeccable, un Daho au sommet de son art, ce bonhomme, probablement sous-estimé par certains, est décidément un Grand Monsieur et ce set, si besoin était, ne fait que confirmer la place à part qu'il occupe aujourd'hui dans cette culture pop qu'il revendique haut et fort.
Lanig