logo

Drunk Tank Pink

Shame

Pistes :

  1. Alphabet
  2. Nigel Hitter
  3. Born in Luton
  4. March Day
  5. Water in the Well
  6. Snow Day
  7. Human, for a Minute
  8. Great Dog
  9. 6/1
  10. Harsh Degrees
  11. Station Wagon

Musiciens :

Charlie Steen (chant) - Sean Coyle-Smith (guitare) - Eddie Green (guitare) - Josh Finerty (basse) - Charlie Forbes (batterie)

Chronique :

Leur premier album Songs Of Praise, sorti en 2018 nous avaient laissés sidérés, excités et très enthousiastes. Ils sentent bon la bière tiède, la poudre à canon et la shepard pie. Le nom de leur groupe signifie « honte » en français, pourtant ils décrochent la timbale royale incrustée de diamants avec ce superbe Drunk Tank Pink sorti le 15 janvier dernier. Un bijou post-punk plein de nuances et très ancré, entre le coup de pelle dans la tronche, et le câlin viril et fraternel.

En quête d’écoute « Feelgood » glossy et léger ? Il n’y a pas d’abonné au numéro que vous demandez. Ces gars-là se sont farcis plus de 350 gigs d’affilée avant de se retrouver confinés dans leur south England natal, la redescente est froide, brutale et vertigineuse. Alors ça introspecte par ici m’sieurs dames, ça cherche un sens à cette putain de vie. Ça l’extrait de grès ou de force de chaque seconde qui s’écoule, à coup de drumstick, de riff et de spokenword. En résultent 11 titres urgents et abrasifs. Stupéfiant funambulisme entre hymne de fête flamboyant à l’instar d’ « Alphabet » ou « March Day », vraie-fausse légèreté acidulée dans « Nigel Hitter » et « Water The Well » (Coucou Gang Of Four, Television) et ténèbres abyssales.

« Born In Luton » souffle le chaud et le froid, sorte de mise en scène du sentiment de désœuvrement opposant deux mouvements très contrastés, bipolarité oppressante brassant mélancolie, apathie et tristesse d’un côté ; instinct de survie, refus et rébellion de l’autre. « Snowday » t’emmène en pleine nature chercher le réconfort. Mais cet enfoiré, occupé ailleurs ce jour-là te laisse plus seul que jamais, avec le poids shakespearien d’une absence, d’un deuil, d’un amour impossible.

Apaisement. T’as envie d’y croire. « Human For A Minute » : Cette douceur cotonneuse, cette basse ronde, cette retenue dans le timbre… un leurre. Des paroles crues et cruelles, elles fouillent tes entrailles, elles t’ordonnent de laisser partir ce qui doit s’en aller.

La fulgurance de la minute et 57 secondes de « Great Dog » ouvre le triangle des Bermudes de cet album décidément très physique et cathartique, avec « 6/1 » et « Harsh Degrees ». Un déferlement de violence prodigieuse, d’énergie créatrice dévoilant au passage l’impressionnante puissance de la machine Shame. Un groupe qui depuis 2018 a gagné en maturité et en solidité dans l’exécution, en complexité et en densité dans l’arborescence de ses morceaux.

De la délivrance incarnée par « Station Wagon » et son crescendo de bruit et de poésie, renaît l’espoir, et l’intime conviction que rien ne dure éternellement. Et de tout ce déchainement de désespoir ne reste dans l’air que la magie de cet excellent album, et une nouvelle fureur de vivre très intensément tout ce qui nous sera donné de vivre à partir de maintenant.

Sheena

Partagez